La plaignante a comparu en tant que conseil d’une demandeure d’asile devant la Section de la protection des réfugiés.
La demande d’asile était axée sur la violence fondée sur le sexe, c’est-à-dire que la demandeure d’asile a été victime de violence physique et sexuelle de la part de son ancien partenaire.
Selon la plainte, trois questions posées par la commissaire étaient inappropriées et elles témoignaient d’une incompréhension fondamentale de la nature de la violence familiale et d’un manque de sensibilité à l’égard des demandeures d’asile ayant subi de la violence fondée sur le sexe, contrairement aux Directives numéro 4 du président intitulées
Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe. Plus précisément, la plaignante a fait valoir qu’il était inapproprié que la commissaire pose à la demandeure d’asile les questions suivantes : [traduction] « Alors, êtes-vous sûre d’avoir été violée? » et « Savez-vous qui est le père? », et qu’elle cherche à savoir pourquoi la demandeure d’asile suivait des séances de counseling depuis aussi longtemps et pourquoi elle avait vu autant de conseillers.
Le Bureau de l’intégrité a transmis la plainte au président pour qu’il décide, en vertu du paragraphe 5.5 de la
Procédure pour déposer une plainte à l’endroit d’un commissaire (la
Procédure), si les allégations étaient visées par le processus de traitement des plaintes.
Le président a décidé que les allégations étaient visées par la
Procédure et a renvoyé la plainte au directeur du Bureau de l’intégrité (le directeur) pour qu’il effectue une enquête.
La commissaire a été invitée à fournir au directeur une réponse à la plainte et a ensuite soumis des observations écrites. Le directeur a écouté l’enregistrement audio de l’audience et a examiné les observations des parties. Il a préparé un rapport d’enquête provisoire présentant ses constatations de faits et son analyse préliminaires, et il a donné aux deux parties l’occasion de le commenter. La plaignante a confirmé qu’elle n’avait aucun commentaire à faire sur le rapport provisoire, et la commissaire a soumis des observations écrites. Le directeur a ensuite préparé un rapport d’enquête final.
Dans le rapport d’enquête, le directeur a conclu qu’il y avait eu manquement au
Code de déontologie des commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (le
Code de déontologie) pour les raisons suivantes :
- Les directives numéro 4 soulignent la nécessité de tenir particulièrement compte des circonstances et des expériences des demandeures d’asile qui craignent d’être persécutées en raison de leur sexe. Les commissaires sont censés traiter les demandeures d’asile victimes de persécution fondée sur le sexe avec un degré de sensibilité approprié qui s’inspire du
Code de déontologie, comme le prévoient les Directives numéro 4. Cette sensibilité doit être respectée tout au long de la procédure.
- Bien que l’objectif de la commissaire soit d’évaluer la crédibilité en étudiant les incohérences entre l’exposé circonstancié de la demandeure d’asile, la preuve documentaire et le témoignage de la demandeure d’asile, la commissaire a posé les questions en cause sans souligner les incohérences qu’elle souhaitait expliquer et sans fournir à la demandeure d’asile un quelconque contexte. Même s’il est possible d’admettre que ces questions devaient être posées, elles l’ont été de façon brutale et elles manquaient de sensibilité. En outre, la troisième question aurait pu être interprétée comme une tentative de minimiser le traumatisme de la demandeure d’asile ou de le prendre à la légère.
- La commissaire aurait pu aborder les trois questions en tenant davantage compte de la sensibilité et de la dignité de la demandeure d’asile. Les questions auraient pu être formulées et posées de manière plus respectueuse et plus sensible.
- Prises dans leur ensemble, les trois questions contestées, ainsi que les observations formulées par la commissaire au cours de l’enquête, tendraient à démontrer un certain niveau de malentendu de la part de la commissaire quant à la façon dont les commissaires devraient faire preuve de sensibilité selon le
Code de déontologie à l’égard d’une demandeure d’asile qui a été victime de violence fondée sur le sexe.
Le rapport d’enquête a été remis au président. Ce dernier était convaincu que l’enquête était approfondie et équitable. Le président a accepté les conclusions du rapport et a conclu qu’il y avait eu manquement au
Code de déontologie.
Les deux parties ont été informées du règlement de la plainte au moyen de lettres de décision de la part du président.
Le président a demandé, dans sa lettre à la commissaire, que celle‑ci réfléchisse aux conclusions du rapport et à la manière dont elles pourraient servir de base à des modifications à l’approche employée par la commissaire en ce qui concerne les questions posées aux demandeures d’asile qui présentent des demandes d’asile fondées sur le sexe. Le président a déclaré que, bien qu’il soit conscient de la nature difficile du travail de la commissaire, les questions auraient dû être formulées de manière plus sensible dans les circonstances.
La vice-présidente de la SPR et les vice-présidents adjoints concernés ont été informés des résultats de l’enquête afin que soient prises des mesures de suivi appropriées. Peu après, l’emploi de la commissaire à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) a pris fin. Comme la commissaire n’était plus une employée de la CISR, des mesures correctives ou disciplinaires n’étaient pas justifiées dans les circonstances.
La plainte était fondée, et le dossier est clos.