Cas no 20-008

​La plaignante était une agente d’audience de l’Agence des services frontaliers du Canada qui a comparu dans le cadre de deux contrôles des motifs de détention effectués par un commissaire de la Section de l’immigration.

Selon la plainte, le commissaire en question n’a pas laissé la plaignante soulever d’objection et il n’a jamais examiné une objection; il interrompait la plaignante et il ne lui a pas permis de présenter ses observations sans interruption; et il a tenté de contrôler la plaignante et de lui imposer son autorité. Toujours selon la plainte, l’attitude du commissaire était dégradante et condescendante; de plus, le commissaire aurait formulé des déclarations irrespectueuses et manquant de professionnalisme et il aurait utilisé un ton grossier et réducteur.

Le Bureau de l’intégrité a transmis la plainte au président pour qu’il décide, en vertu du paragraphe 5.5 de la Procédure pour déposer une plainte à l’endroit d’un commissaire ​(la Procédure), si les allégations étaient visées par le processus de traitement des plaintes.

Le président a décidé que les allégations étaient visées par la Procédure et a renvoyé la plainte au directeur du Bureau de l’intégrité (le directeur) pour qu’il effectue une enquête.

Le commissaire a été invité à fournir au directeur une réponse à la plainte et a ensuite soumis des observations écrites. Le directeur a écouté l’enregistrement audio des audiences et a examiné les transcriptions ainsi que les observations des parties. Il a préparé un rapport d’enquête provisoire présentant ses constatations de faits et son analyse préliminaires, et il a donné aux deux parties l’occasion de le commenter par écrit et de parler de tout commentaire avec lui par téléphone. Le commissaire a confirmé qu’il n’avait pas de commentaires à faire sur le rapport provisoire; la plaignante a soumis des observations écrites. Le directeur a ensuite préparé un rapport d’enquête final.

Dans le rapport d’enquête, le directeur a conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement au Code de déontologie des commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada​ (le Code de déontologie) pour les raisons suivantes :

  • Dans l’ensemble, la conduite du commissaire durant les deux audiences était courtoise et professionnelle.
  • La question de savoir si le commissaire a commis une erreur en ne permettant pas à une partie de présenter une objection ou en omettant d’examiner une objection se rapporte à l’exercice du pouvoir discrétionnaire du décideur et elle n’est pas visée par la Procédure. Toutefois, comme la conduite du commissaire pouvait être en cause — par exemple il aurait fait des déclarations irrespectueuses ou adopté un ton irrespectueux — cette question a été examinée dans le cadre de l’enquête.
  • Les conseils n’ont pas un droit de présenter leur cause de façon ininterrompue. Les commissaires devraient veiller activement à avoir un dossier de preuve suffisant sur lequel fonder leur décision, comme il est expliqué dans les Directives numéro 2 du président : Détention. Tout au long des audiences en question, le commissaire est intervenu à de nombreuses reprises pour demander des précisions ou diriger la conseil vers un sujet qu’il percevait comme lacunaire ou préoccupant. Le commissaire s’occupait activement des questions et de la gestion de l’audience. Il n’a pas interrompu la présentation des observations de façon grossière ou irrespectueuse.
  • En ce qui concerne les allégations selon lesquelles le commissaire a tenté de contrôler la plaignante dans l’exercice de ses fonctions et qu’il était irrespectueux et condescendant à son égard, les incidents faisant l’objet de la plainte étaient des exemples de la gestion de l’audience entreprise par le commissaire de façon respectueuse.
  • Le rôle d’un commissaire est notamment de diriger l’audience, de recueillir les éléments de preuve nécessaires pour rendre une décision éclairée et d’inciter le conseil à adopter le calme et le professionnalisme nécessaires pour assurer une audience équitable et ordonnée.
  • Un commissaire peut juger nécessaire d’expliciter certaines choses comme la procédure, et il a le droit de le faire, même si les conseils présents sont chevronnés. Le fait de veiller à ce que les parties comprennent le processus contribue à l’objectif de tenir des audiences équitables, ordonnées et efficaces. Il n’y avait rien de condescendant ni d’irrespectueux dans le ton du commissaire lorsqu’il a expliqué la procédure à la plaignante.
  • Les observations du commissaire ne manquaient pas de respect ni de professionnalisme.

Selon les conclusions du rapport d’enquête, le commissaire n’avait pas enfreint le Code de déontologie, mais certains des comportements du commissaire pouvaient être déroutants et mal interprétés, même s’ils étaient bien intentionnés. La plaignante trouvait que la façon dont le commissaire s’exprimait était condescendante. Selon le rapport, le commissaire, dans les observations qu’il a présentées au cours de l’enquête, s’est engagé à travailler pour éliminer son habitude de soupirer (qui est pour lui une technique de régulation), laquelle, le commissaire le reconnaît, pourrait être mal interprétée et perçue comme un manque de respect. Selon le rapport, le commissaire devrait être encouragé à éviter de demander de façon répétée si la personne écoute ou si elle se concentre pour ne poser ces questions au conseil que si elles sont vraiment nécessaires. En outre, le commissaire devrait être encouragé à être plus attentif à la perception possible de ses remarques ou de ses expressions par le conseil présent.

Le rapport d’enquête a été remis au président. Ce dernier était convaincu que l’enquête était approfondie et équitable. Le président a accepté les conclusions du rapport et a conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement au Code de déontologie.

Les deux parties ont été informées du règlement de la plainte au moyen de lettres de décision de la part du président.

Dans sa lettre de décision au commissaire, le président a encouragé le commissaire à réfléchir, dans le cadre de son perfectionnement professionnel, aux suggestions contenues dans le rapport d’enquête concernant l’utilisation de certaines questions et expressions et à la façon dont celles-ci peuvent être perçues.

La plainte a été rejetée, et le dossier est clos.